surgeetambula Marc KOLANI

"Celui qui ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus": règle d'or du travail chrétien

« CELUI QUI NE VEUT PAS TRAVAILLER, QU’IL NE MANGE PAS NON PLUS » :

règle d’or du travail chrétien.

 

Ce principe moral tiré de la Deuxième lettre de saint Paul aux Thessaloniciens (2Th 3, 10) entend deux conclusions : d’une part, le travail ne saurait manquer à qui veut travailler. D’autre part, les chrétiens ne doivent pas vivre en parasites. En effet, les grandes difficultés que certains éprouvent à s’employer ou à se faire employer amènent à s’interroger sur le droit au travail. Paradoxalement, cette recrudescence dans l’importance accordée au travail n’a pas résolu définitivement le problème de la paresse et de l’oisiveté, réalités aussi vieilles que l’humanité. L’objectif de cet article est de dégager, pour nos sociétés d’aujourd’hui, les implications sociales de la conception paulinienne du travail.

 

I-   LA CONCEPTION DU TRAVAIL CHEZ SAINT PAUL

 « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus ». Par « travail », Paul inclut tout ce qui rejaillit des activités de l’homme en service utile pour la communauté. En ce sens, chacun est tenu, selon sa condition, ses dons, et ses possibilités, de prendre sa part personnelle dans les labeurs de la communauté. Voyons comment saint Paul a vécu le travail et ce qu’il en enseigne.

 

1- Le travail dans la vie de saint Paul

Paul tient à n’être à la charge de personne. Il gagne son pain à la sueur de son front. Il considère le travail comme un de ses plus beaux titres de gloire. Faiseur de tentes, il s’appliquait nuit et jour à son métier comme on peut le lire dans les Actes des Apôtres : « Les mains que voici, vous le savez vous-mêmes, ont pourvu à mes besoins et à ceux de mes compagnons » (Ac. 20, 34). Paul ne mangeait gratuitement le pain de personne. Certes, il en aurait eu le droit, car l’ouvrier mérite son salaire ; car celui qui plante une vigne en mange le fruit ; car ceux qui travaillent aux fonctions sacrées vivent des revenus de l’autel. Mais Paul propose l’Evangile gratuitement et tient à ne pas faire valoir tous ses droits. Ce faisant, il sauvegarde son indépendance apostolique et ferme la bouche aux faux apôtres qui n’imitent pas son désintéressement. Il ne veut pas des biens des fidèles : c’est eux-mêmes qu’il désire ; volontiers, il dépensera de l’argent et se dépensera lui-même tout entier pour leurs âmes ; n’est-ce pas aux parents qu’il revient d’amasser pour leurs enfants et non les enfants pour leurs parents ?

 

2- L’enseignement de saint Paul

« Vous savez bien qu’il faut nous imiter », écrivait Paul aux chrétiens de Thessalonique. La vie que menait Paul devait servir d’exemple aux chrétiens. C’est ainsi que pour la question du travail, Paul donne des indications très claires. Comme quoi, « celui qui ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus ». Autrement, le travail est à la fois un droit et un devoir. Par conséquent, la paresse tout comme l’oisiveté n’a pas droit de cité.

a- Le travail comme un droit fondamental :

Le travail est un droit fondamental parce que l’homme ne peut s’épanouir et vivre dans la quiétude sans le travail, mère de tous biens. « Celui qui ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus ». Cela entend d’abord que jamais le travail ne saurait manquer à qui veut travailler ; cela entend ensuite que le travail est un droit et un droit naturel ; cela entend enfin que le travail est source de droits parmi lesquels le droit au pain quotidien. On le comprend aisément dans la mesure où « Tous les biens terrestres de la nature appartiennent en commun et indistinctement à tous les hommes. Dieu leur a donné une destination universelle. L’homme quant à lui, doit assurer les conditions de sa vie présente et préparer celles de l’avenir. C’est pourquoi il doit disposer non seulement des fruits du sol, mais encore de ce sol qu’il cultive en vue de futures récoltes et qu’il marque ainsi de son empreinte. De là son droit de posséder les biens d’usages et les moyens de production, droit naturel qu’il tient de Dieu ». Cependant, si le travail est un droit, n’est-il pas tout aussi un devoir ?

b-  Le travail comme devoir ; la paresse et l’oisiveté comme vices :

« Nous avons appris que certains parmi vous vivent dans le désordre, ne travaillent pas, mais se livrent à de vaines curiosités ». Paul qui aurait pu rester sans travailler, travaillait tellement qu’il arrivait même à subvenir aux besoins des autres ; pourquoi à plus forte raison, les autres ne devaient-ils pas agir de même ? Son attitude exige de ceux qui s’adonnent à l’Evangélisation de ne pas rester oisifs. Pour Paul, prier et jeûner dans l’oisiveté n’est pas du travail : « Ne faisant rien, se livrant à de vaines recherches. Quant à ceux qui se comportent ainsi, nous les avertissons (…) afin que, travaillant en silence, ils mangent leur pain » (cf. 2Th3, 11-12). Le chrétien doit travailler non seulement pour se procurer du pain, mais aussi par sollicitude envers le prochain plus pauvre, auquel le Seigneur commande de donner à manger, à boire, des vêtements, un accueil, des soins et une compagnie. L’aumône est une miséricorde, et la miséricorde s’exerce non envers les justes, mais envers les pécheurs. Paul ne repousse pas, comme on peut le prétendre, la prière et les exercices de piété ; bien au contraire ; et la tradition chrétienne l’a si bien compris et développé à travers la formule bénédictine : « ora et labora », « prie et travaille ». Pour tout dire, la paresse et l’oisiveté, pour Paul, n’ont pas droit de cité dans la vie d’un chrétien. Cependant Alors se pose la rude question du chômage que Paul n’a malheureusement pas abordé dans ses lettres.

 

II-                     QUELLE IMPLICATION SOCIALE POUR NOUS AUJOURD’HUI ?

A travers cette réflexion sur la conception paulinienne du travail, il se dégage nettement que le travail fait partie de l’être même de l’homme. Aujourd’hui, cela implique pour nous deux exigences : d’une part, travailler à ce que chacun ait quelque chose à faire ; d’autre part trouver des voies et moyens pour juguler les problèmes de la paresse et de l’oisiveté.

 

1-   Quelques pistes en vue de remédier au problème du chômage :

De nos jours, des problèmes innombrables minent le secteur du travail. Parmi ces difficultés figurent en premier plan celles des relations professionnelles  interpersonnelles, de l’excès ou du manque du travail, de la maltraitance, de la mauvaise rémunération mais aussi et surtout celle du chômage. Nous voulons, comme apport, proposer quelques pistes en vue de l’éradication du chômage :

v   Politique de création d’emplois : il s’agira des emplois dans le secteur public mais beaucoup plus dans le secteur privé avec le soutien et l’appui de l’Etat. cela concerne tout homme en particulier. Mais c’est encore plus la tâche de l’Etat de chercher à répondre par de nouveaux emplois à des besoins non satisfaits qui n’ont pas pu jusqu’ici se faire suffisamment reconnaître.

v   Occupation suffisante des heures de travail avec pour conséquence la réduction des heures de travail : puisque généralement, la main d’œuvre est très importante, une des solutions serait de permettre un travail continu. Que de jour comme de nuit, il y ait des gens qui travaillent. Ainsi, il y aurait des emplois diurnes d’une part, et  nocturnes, d’autre part.

v   La réduction des heures de travail : réduire les heures de travail, c’est aussi un moyen d’embaucher plusieurs personnes à la fois. On pourrait alors diviser les heures de travail en quatre. Deux tours dans la journée et deux, la nuit. Quel que soit le nombre des demandeurs d’emploi, nous espérons qu’avec cette stratégie, s’il y a encore des chômeurs, leur nombre sera largement réduit.

v   La formation adaptée et les recyclages : parfois, le chômage est dû au manque de qualification ou à l’éducation inadéquate. Pour cela, il échoit à nos pays de faire en sorte que l’éducation soit de mise et que la formation, sous toutes ses formes, ne manque à personne de ses citoyens. L’éducation, n’est-elle pas la clé de voûte de tout développement ?

v   La promotion des petites entreprises : il importe que tous sachent que ce ne sont pas seulement les fonctions publiques qui octroient du travail. En outre, les chômeurs eux-mêmes devraient prendre conscience de cette situation afin de chercher à se mettre en collectivité et, partant, faire preuve d’initiatives privées.

v   La promotion de l’agriculture : beaucoup pensent qu’avoir du travail, c’est être nécessairement engagé par l’Etat ou par une société privée. Parmi les initiatives personnelles, nous nommons l’agriculture, surtout dans notre pays où il n’y a pas trop de difficultés à se procurer des parcelles. Toutefois, nous en appelons à la responsabilité de l’Etat à encourager et à aider les agriculteurs pour qu’ils réussissent dans leurs travaux. Les aider, c’est par exemple, mettre à leur disposition le matériel du travail, les soutenir pour une ventilation juste des produits des champs et mettre à leur disposition des prévisions météorologiques fiables.

 

2-          Approches pour résoudre les problèmes de la paresse et de l’oisiveté :

v   L’éducation familiale : Si nous entendons l’éducation comme l’enseignement des règles de conduite sociales et la formation des facultés physiques, morales et intellectuelles qui président à la formation de la personnalité, elle sera donc le premier lieu d’apprentissage du travail à l’enfant. Les parents devraient s’employer à inculquer les bonnes habitudes à leurs enfants en les motivant non seulement au travail mais plus encore au travail bien fait. Les motiver revient à les encourager par des récompenses, par des mots d’encouragement, en leurs faisant savoir que la paresse et l’oisiveté sont des vices et, s’il  est opportun, en les punissant pour le refus de se mettre au travail ou pour le travail délibérément mal accompli.

v   La formation scolaire : En vue de maintenir une continuité par rapport à l’éducation familiale, l’école a le devoir d’amener les enfants à aimer le travail et à bien l’accomplir. C’est pourquoi, en plus du travail intellectuel qui est leur premier devoir d’état, les élèves doivent être initiés aux travaux manuels, et ce dans le respect de la déontologie de l’enseignement. Aussi par les récompenses et les félicitations doit-on donner le goût du travail bien fait aux élèves.

v   La catéchèse et la prédication : la catéchèse, en plus de la formation spirituelle est habilitée à donner une formation humaine qui vaille aux catéchisés. Ainsi, parmi les thèmes de catéchèse, on pourrait insérer celui du travail. A la séance de catéchèse sur  ledit thème, on se servira par exemple du texte de saint Paul 2 Th 3, 6- 15 comme texte de méditation pour faire comprendre aux auditeurs que le travail est un devoir pour tous et que personne, et encore moins le chrétien ne peut vivre en marge de cette réalité. Aussi pendant les prédications ou les homélies, les pasteurs pourraient-ils faire allusion à l’importance du travail et inviter les fidèles à éloigner de leur vie les vices de paresse et de l’oisiveté.

 

Pour conclure, disons que le travail est un droit fondamental et c’est un bien pour l’homme : un bien utile, digne de lui car apte précisément à exprimer et à accroître la dignité humaine. Saint Paul l’a bien compris. C’est pourquoi, avec une force exceptionnelle, il enjoint aux chrétiens d’aimer le travail. Ainsi, à l’en croire, le travail est un droit et un devoir. Et par conséquent, s’adonner à la paresse ou à l’oisiveté pour quelque motif que ce soit est hors de question pour un chrétien. Cette interpellation nous engage tous aujourd’hui où sous tous les cieux le manque de travail frappe avec beaucoup plus d’acuité. Les implications pour nous seraient donc de trouver des voies et moyens pour pallier les difficultés liées au chômage, à la paresse et à l’oisiveté. L’Eglise n’a-elle pas, au travers de l’Encyclique Laborem Exercens du Pape Jean Paul II, qualifié le chômage d’une « véritable calamité sociale » ? Ainsi, saint Paul continue à frapper aux portes des cœurs aussi bien des croyants que des non-croyants en nous exhortant : aimez le travail, « celui qui ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus ! »

 



26/05/2012
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